Kim Muntinga
Critique

« Darfall » : un joli jeu de stratégie avec quelques zones d’ombre

Kim Muntinga
8/5/2025
Traduction: Rose-Hélène Moquet
Photos: Kim Muntinga

Magie, monstres et gestion des ressources : « Darfall » combine la stratégie de construction avec des éléments de tower defence et de RPG. Le mélange des genres fonctionne, dans la mesure où l’on accepte de faire des concessions sur la technique et la profondeur.

Le brouillard s’accroche à la sombre forêt de sapins lorsque je construis mes premiers bâtiments. Une cabane de bûcheron, une mine et quelques maisons pour les colons qui n’ont aucune idée de ce que la nuit leur réserve. En mode survie, les journées de Darfall semblent paisibles, presque confortables. Mais ce n’est qu’une illusion. Car c’est la nuit que le jeu commence. Et il commence fort.

Développé par SquareNite, Darfall est un jeu de construction-stratégie en temps réel avec des éléments de tower defence et de magie, ainsi qu’un soupçon d’action RPG. Il associe la construction, la gestion des ressources et la lutte contre les vagues de monstres nocturnes. Le tout s’inscrit dans un univers fantastique et sombre, où la claustrophobie peut rapidement s’installer lorsque l’horizon est englouti par les ténèbres.

Campagne ou survie dans l’obscurité

Le jeu peut se jouer en mode campagne ou survie. Le mode campagne est une série peu cohérente de missions sur une grande carte permettant de découvrir de nouvelles régions, d’améliorer mon héros et de débloquer de nouvelles technologies. Elles permettent de se familiariser lentement avec les mécanismes du jeu et de comprendre petit à petit les différents systèmes. Chaque carte apporte de nouveaux défis et de petites variations dans la construction. La mécanique jour/nuit ne joue aucun rôle ici.

Bienvenue à Aganor : la carte de la campagne vous permet de jouer à plusieurs missions.
Bienvenue à Aganor : la carte de la campagne vous permet de jouer à plusieurs missions.

En choisissant le mode survie, on est directement plongé dans le grand bain : ressources limitées, menace immédiate, construction libre et pression constante pour réfléchir à la prochaine attaque. L’exploration de la carte passe ici au second plan.

Si le mode campagne semble plus structuré et accessible aux débutants, le mode survie s’adresse à tous ceux qui aiment prendre des décisions rapides et difficiles et apprécient la brutalité de la nuit. Outre les vagues de monstres, il faut aussi gérer la faible visibilité de l’obscurité.

Pour ma part, j’ai commencé en mode campagne pour me familiariser avec le monde et ses mécanismes. Et même si Darfall ne m’a pas pris au dépourvu, j’ai vite compris que ce monde pourrait s’avérer impitoyable à quiconque le sous-estime.

Le mode survie permet de choisir l’endroit que l’on veut défendre.
Le mode survie permet de choisir l’endroit que l’on veut défendre.

Gameplay et mécanique

Ma première confrontation dans Darfall est étonnamment réservée. Pas de base, pas de travailleurs, pas de matières premières. Au lieu de cela, mon héros est directement plongé dans le sombre et fantastique monde d’Aganor. La première mission du mode campagne sert d’introduction en douceur. J’apprends comment fonctionne le système de combat et comment utiliser les capacités spéciales de mon personnage.

La première mission du mode campagne me permet de mieux connaître mon héros et le système de combat.
La première mission du mode campagne me permet de mieux connaître mon héros et le système de combat.

L’aspect construction apparaît seulement lors de la deuxième mission. Je peux enfin collecter des ressources, construire des bâtiments et placer des défenses. Mes ouvriers coupent du bois, extraient du minerai, cultivent des denrées. Pendant ce temps, j’explore la carte avec mon héros, je pille des caisses, je me débarrasse de petits ennemis et j’aide parfois à collecter des ressources. C’est particulièrement utile lorsque certains matériaux se font rares. Je dois également régulièrement survivre aux attaques de mes adversaires.

Le gameplay repose sur des décisions prises sous la pression : vais-je d’abord construire une ferme ou plutôt une tour de défense ? Est-ce que j’investis le bois récolté dans de nouveaux bâtiments ou pour construire des planches ? Et ces planches, est-ce que je les utilise pour construire des bâtiments de plus grande valeur ou pour fabriquer des arcs pour mes combattants ? Toutes ces décisions semblent importantes, même si le jeu pourrait être peaufiné à certains endroits. Les fonctions de confort telles que les priorités de construction ou la recherche intelligente de chemins font actuellement défaut. C’est justement dans des situations sous pression que je réalise à quel point de tels outils seraient précieux.

Trop d’unités de combat construites et pas assez de nourriture à disposition : j’ai dû réorganiser toute mon économie.
Trop d’unités de combat construites et pas assez de nourriture à disposition : j’ai dû réorganiser toute mon économie.

Malgré cela, l’interaction entre la construction de base, les combats en temps réel et le système de héros fonctionne. Le jeu ne réinvente pas le genre et manque d’équilibre à certains endroits, mais il propose toutefois un mélange cohérent et motivant par sa pression constante et son cycle précis de calme et de danger en mode survie.

Monde et atmosphère : la beauté dans l’ombre

Ce qui me plaît particulièrement dans Darfall, c’est le sentiment permanent de n’être jamais vraiment sûr de rien. Même dans les moments de calme, lorsque mes ouvriers font leurs rondes, que le soleil brille à travers la cime des arbres et que tout semble calme pendant quelques minutes, il y a toujours une certaine agitation qui flotte dans l’air. Comme si le monde savait déjà que j’allais devoir bientôt me battre à nouveau.

En mode campagne, chaque mission est précédée par une courte histoire en images.
En mode campagne, chaque mission est précédée par une courte histoire en images.

Visuellement, Darfall mise sur un style clair et graphique. Les forêts, les rivières, le brouillard et les ruines racontent de petites histoires sans qu’un seul dialogue ne soit prononcé. En mode campagne, je me promène dans des villages en ruine, des plaines arides et des marais imprégnés de magie.

En mode survie, l’urgence est plus grande. Lorsque le jour décline, le brouillard s’étire sur le paysage tandis que les ombres enveloppent les chemins et les parcelles de forêt. Mon camp se transforme aussitôt en une forteresse de peur. Les tours scintillent d’une lumière magique, mes unités se regroupent et je ne peux qu’espérer survivre à la prochaine vague d’ennemis. Mes adversaires utilisent l’obscurité de la nuit pour se protéger et j’ai du mal à les repérer. Ils parviennent ainsi à endommager ou détruire secrètement des bâtiments importants.

L’obscurité engloutit presque tout, créant une atmosphère sombre et captivante.
L’obscurité engloutit presque tout, créant une atmosphère sombre et captivante.

Une base technique solide sur des poutres fragiles

Darfall n’est pas un échec total sur le plan technique, mais il est loin d’être parfait. Lors de mes premières heures de jeu, le jeu était généralement stable, mais plus mes colonies grandissaient, plus je ressentais des baisses de performance, sachant que je n’ai jamais eu plus de 20 ouvriers et combattants. Ce n’est pas dramatique pour une version précoce, mais c’est tout de même frappant. Espérons que la version complète bénéficiera de corrections rapides.

Le charpentier fonctionne sans main-d’œuvre. Je peux utiliser des bonus pour améliorer le bâtiment.
Le charpentier fonctionne sans main-d’œuvre. Je peux utiliser des bonus pour améliorer le bâtiment.

L’interface utilisateur est fonctionnelle, mais manque cruellement d’élégance. Les ressources et les unités sont en principe clairement identifiables, mais de nombreuses informations (buffs, valeurs d’efficacité...) sont cachées ou absentes. J’aurais aimé un contrôle plus poussé, en particulier dans le trépidant mode survie : par exemple des priorités pour les ouvriers ou une gestion claire des ressources.

Le développement de mon héros fait partie des réussites du jeu. Il est présenté de manière éclairante et amusante. L’équipement et le changement d’inventaire fonctionnent également très bien. Seule la comparaison des valeurs m’a un peu irrité au début, jusqu’à ce que je comprenne ce que le jeu attendait de moi.

J’apprécie le système de niveaux de mon héros.
J’apprécie le système de niveaux de mon héros.
Il est divisé en deux parties : livre des capacités (à gauche) et livre des atouts (à droite)
Il est divisé en deux parties : livre des capacités (à gauche) et livre des atouts (à droite)

Équilibre et difficulté : entre usure et équité

On se rend vite compte que Darfall ne veut pas être un jeu de stratégie confortable. Même si le mode campagne démarre en douceur, les exigences augmentent ensuite considérablement. Chaque carte me confronte à de nouvelles restrictions ou à de nouveaux défis : trop peu de ressources, des positions de départ défavorables ou de mauvaises petites missions intermédiaires. J’ai dû apprendre à construire efficacement, à bien gérer les ressources et à toujours avoir un plan d’urgence.

Mon héros est mort. Il réapparaît immédiatement, mais j’ai sous-estimé mes adversaires et la map. Je finis par réussir la mission au deuxième essai.
Mon héros est mort. Il réapparaît immédiatement, mais j’ai sous-estimé mes adversaires et la map. Je finis par réussir la mission au deuxième essai.

Le niveau de difficulté devient exigeant au fil du jeu, mais reste juste. Si j’échoue, je sais toujours pourquoi : construction trop tardive, mauvaise priorité ou pas assez de défense. Cependant, certaines choses m’ont semblé mal équilibrées. Je l’ai surtout remarqué dans la gestion des ressources. La dépendance au bois est totale. Le comportement de l’IA varie également : elle attaque parfois les points faibles, et d’autres fois fonce tête baissée contre les murs ou dans mon armée.

J’ai réussi la mission en mode survie. Je peux la recommencer pour tenter d’améliorer mon score.
J’ai réussi la mission en mode survie. Je peux la recommencer pour tenter d’améliorer mon score.

« Darfall » m’a été fourni par SquareNite. Le jeu est disponible sur PC depuis le 8 mai.

Bilan

Un solide mélange de genres avec une marge de progression

« Darfall » n’est pas un chef-d’œuvre, mais c’est un jeu plein de caractère. Il apporte à l’écran un mélange familier et efficace de stratégie de construction, de survie et de tower defence relevé par un soupçon d’action RPG. C’est surtout son atmosphère qui me reste en mémoire.

Les mécanismes sont solides et le gameplay fonctionne, même s’il semble encore un peu grossier à certains endroits. Les commandes, l’interface et l’équilibrage ont souvent besoin d’être peaufinés. J’ai tout de même eu le sentiment de pouvoir créer, défendre et améliorer quelque chose dans ce monde. Le personnage du héros jouable apporte de la variété sans pour autant devenir la pièce maîtresse du jeu.

Les deux modes (campagne et survie) s’adressent à différents types de joueurs et se complètent judicieusement. Le mode campagne permet de progresser lentement, le mode survie est beaucoup plus immédiat. Le rythme de jeu est clair et intéressant, fait de construction, de préparation et de tactique. Même sans histoire épique ou systèmes sans cesse renouvelés, le jeu arrive à être motivant, surtout grâce à la lutte quotidienne pour la survie.

Le contenu manque tout de même encore de profondeur. Les cartes et les types d’ennemis n’offrent pas assez de variété pour s’avérer captivants à long terme. Des objectifs supplémentaires, des événements aléatoires ou des modificateurs auraient le potentiel de diversifier chaque manche et d’augmenter considérablement la diversité stratégique. Malgré ces faiblesses, le concept de base classique porte le jeu, en particulier pour les fans de stratégie de construction et de survie.

Pro

  • combinaison de stratégie, de défense et de contrôle des héros
  • atmosphère distincte avec une tension jour/nuit en mode survie
  • aspect fantasy sombre et captivant

Contre

  • l’interface utilisateur n’offre pas assez de clarté et de confort
  • lacunes techniques dans certains domaines (problèmes de performance, équilibrage)
  • peu de diversité de cartes et d’ennemis
Photo d’en-tête : Kim Muntinga

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