
En coulisse
Le voyage en image
par Pia Seidel
La société Bocci, en vendant la recette de sa bougie de forme inhabituelle estampillée NFT, débarque sur un tout nouveau marché et ravit le cœur des collectionneurs. Mais tout cela a un prix.
Sur le Web, on trouve des instructions de bricolage à la pelle. La nouveauté ? Ces dernières visent dorénavant des objets design et permettent de qualifier le travail réalisé soi-même d'original. Comment est-ce possible ? Grâce aux jetons non fongibles qui confèrent aux œuvres numériques une signature virtuelle pour empêcher leur reproduction. La marque canadienne Bocci utilise pour la première fois la méthode NFT afin de générer des kits de bricolage de sa bougie 64 en édition limitée. De cette façon, la bougie devient non seulement unique, mais peut être vendue dans le monde analogique en premier lieu.
Jusqu'à présent, les sculptures composées de 280 lampes en verre sphériques individuelles suspendues au plafond à 30 mètres à l'aide de fils de cuivre ne posaient aucun problème à Bocci. Cette entreprise d'éclairage et de design, qui possède une verrerie affiliée, est connue pour ses installations d'éclairage élaborées qui sont à l'interface avec l'art. Mais la conception de la bougie 64 de 2018 représente un défi pour Omer Arbel, concepteur et directeur créatif. Pas la mise en œuvre du prototype, mais sa vente : la bougie est fabriquée étape par étape en versant de la cire chaude dans un récipient rempli d'éclats de glace et en la laissant refroidir à l'intérieur. Il en résulte la formation de nombreuses vrilles filiformes, qui peuvent se briser lors du transport.
La bougie devrait être versée dans un bloc de glace solide, puis transportée comme du poisson frais, ce qui permettrait aux collectionneurs de faire fondre la glace sur place et de conserver l'œuvre d'art en cire intacte, explique Omer Arbel dans un article publié sur Dezeen. Cela prendrait trop de temps et serait trop coûteux. Toutefois, avec l'avènement des NFT, l'idée qui sous-tendait la conception de la bougie spéciale pouvait désormais prendre vie.
Depuis fin mars, une édition limitée à 64 exemplaires de la recette secrète est mise en vente sur la plateforme Rarible au prix de 0,05 Ethereum (ETH), soit environ 80 CHF. Lié à un NFT, chaque kit de bricolage comprend des instructions de fabrication et une vidéo du processus. Contrairement au bitcoin, celui-ci n'est pas échangeable, mais utilise la même technologie blockchain que celle que l'on prête aux cryptomonnaies. Cette technique rend une œuvre d'art virtuelle unique et donne à de nombreux artistes la possibilité de gagner de l'argent avec leurs œuvres virtuelles sur le net. Et les amateurs de design peuvent désormais collectionner des créations virtuelles comme les rendus 3D de l'artiste Charlotte Taylor, pour lesquels il n'existait auparavant aucun marché.
Dans le cas de Bocci, on peut fabriquer soi-même l'objet exclusif du designer après l'avoir acheté. Pourtant, il y a un piège, ou deux, pour être précis. D'une part, il sera difficile de revendre la bougie 64 dans le monde « réel » sans la technique du bloc de glace. D'autre part, des critiques comme l'artiste britannique Memo Akten mettent en garde contre la forte consommation d'énergie qu'implique la création – dite minage – d'un seul jeton. Pour pouvoir payer avec Ethereum, il faut d'abord mettre la main sur cette monnaie, ce qui nécessite une grande puissance de calcul générant des quantités massives de CO2. Cela pourrait bientôt mettre un frein à la vente florissante d'œuvres utilisant la méthode NFT – aussi insolites soient-elles –, pour autant que les artistes attachent de l'importance à la durabilité de leurs œuvres.
Art et cryptomonnaies : une association réussie ?
Le concours est terminé.
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