En coulisse

Pourquoi les bandes-annonces comportent-elles des reprises de chansons connues ?

Simon Balissat
10/9/2020
Traduction: traduction automatique

Depuis quelques années, des chansons connues, reprises à un rythme dramatiquement lent, servent de bande-son à des bandes-annonces de films. L'exemple le plus récent est la bande-annonce de "Dune". Comment est née cette tendance et quel est le rôle d'un chœur de femmes belges dans cette histoire.

Exactement 1:12 minutes s'écoulent dans la bande-annonce de l'adaptation cinématographique de l'épopée de science-fiction "Dune" par Denis Villeneuve jusqu'à ce qu'une voix d'homme chante "And all that you touch / And all that you see". Bon sang, je connais cette chanson. Mais qu'est-ce que c'est ? "And all that you taste"... Est-ce une reprise de Bowie ? "All you feel".

Heureka ! C'est Pink Floyd!

"Eclipse", le final éblouissant de leur chef-d'œuvre "Darkside of the Moon", sorti en 1973. Les paroles et l'ambiance correspondent au montage de la bande-annonce comme si Roger Waters avait écrit la chanson uniquement pour ces trois minutes.

Waters a tout au plus approuvé la reprise, elle a été produite par l'usine de bandes sonores de Hans Zimmer. L'Allemand utilise ainsi une astuce courante. Des bandes-annonces avec des reprises de chansons connues, il y en a à la pelle. "Wonder Woman 1984" s'inspire de New Order, avec un break légendaire. Beyoncé se couvre elle-même dans "50 Shades" trailer, la reprise de "Survivor" chez "Tomb Raider" ne fait que la libérer.

Que ce soit David Bowie, The Rolling Stones, Nirvana ou Sting - presque aucun* artiste n'est épargné par une couverture de bande-annonce. Le style est généralement similaire : une version ralentie de l'original, avec un accompagnement orchestral en surface. Elles commencent calmement, s'intensifient dans leur construction et se terminent par un cliffhanger musical. Si les chansons de reprise sont si populaires dans les bandes-annonces, c'est grâce à une coïncidence.

Une chanson venue des profondeurs d'Internet

Au printemps 2010, le réalisateur David Fincher fait appel à Mark Woollen pour produire la bande-annonce de sa dernière œuvre, Social Network. Woollen et sa société sont passés maîtres dans l'art de transformer des films complexes en bandes-annonces créatives. Ils considèrent la bande-annonce comme une œuvre d'art à part entière, qui ne doit pas nécessairement résumer l'intrigue du film dont elle fait la promotion, mais qui doit rester dans l'esprit du public. Les bandes-annonces moyennes présentent tout ce qu'un film a à offrir. Ce faisant, elles risquent de dévoiler une partie de l'intrigue. Si vous regardez le film, vous avez l'impression d'avoir déjà tout vu. Woollen, en revanche, fait le contraire. Avec lui, le film reste un mystère. Dans ses bandes-annonces, il réduit le matériel d'origine à son essence et transmet une ambiance, pas une histoire achevée.

La commande de la bande-annonce de "Social Network" - le film sur le fondateur de Facebook Mark Zuckerberg - est particulièrement difficile. "La presse n'a jamais donné sa chance au film", explique Wollen dans une interview au New Yorker. "Le consensus était clair : comment pouvez-vous faire un film sur Facebook ? Quelle est la prochaine étape ? eBay ou Amazon ?". Pour compliquer les choses, Fincher est en plein montage et Trent Reznor et Atticus Ross n'ont pas encore composé une mesure de leur bande-son (qui remportera plus tard un Oscar).

Des créateurs de tendances involontaires : Scala et Kolacny Brothers. Image : Nathan Dobbelaere
Des créateurs de tendances involontaires : Scala et Kolacny Brothers. Image : Nathan Dobbelaere

Le moment eurêka vient à Mark Woollen alors qu'il fouille dans son disque dur. Quelques années plus tôt, il était tombé sur une reprise de la chanson "Creep" de Radiohead dans les profondeurs de l'Internet, sur un "site à l'échelle des géo-villes", comme il dit. Un pur hasard. La chorale féminine belge de 200 personnes "Scala and Kolacny Brothers" interprète le tube de Radiohead et cela colle parfaitement aux images oppressantes fournies par le réalisateur Fincher. La pochette commence calmement, monte en puissance et se termine en apothéose par un cliffhanger musical. Les paroles de la chanson, qui parlent d'un marginal rongé par l'apitoiement sur soi-même, sont tout à fait adaptées au film sur le marginal Mark Zuckerberg. Woollen ouvre la bande-annonce avec un diaporama de 50 secondes d'images de stock qui ressemblent à une publicité kitsch pour Facebook. Ce n'est qu'ensuite qu'il diffuse les premières images du film. Un risque qui a heureusement été bien accueilli par le réalisateur Fincher. Le résultat est véritablement un cas d'école en matière de production de bandes-annonces.

La courte vidéo fait l'effet d'une bombe, notamment grâce à la musique de la chorale féminine belge. Le festival hipster en plein air Coachella réserve "Scala and Kolacny Brothers", des commandes pour d'autres trailers suivent. Mark Woollen pose, grâce à cette découverte fortuite, la première pierre du style des bandes-annonces modernes.

Dix ans plus tard, les studios utilisent le style ad nauseam. Ce qui était la voix explicative grave dans les bandes-annonces des années 80 est aujourd'hui la reprise lente. Elle crée une confiance diffuse en vous donnant une mélodie et des paroles de chanson connues que vous pouvez associer, mais que vous ne pouvez pas reconnaître au premier abord. Enfin, le moment Eureka vous donne un sentiment de réussite. Vous vous sentez bien et vous vous souvenez plus tard plus facilement des images que vous avez vues. Par curiosité, vous finissez par aller voir le film, tant la bande-annonce est ancrée dans votre mémoire. Une fois assis dans la salle de cinéma, la musique a déjà rempli son rôle : Les couvertures de bandes-annonces ne sont que rarement intégrées à la bande-son des films dont elles font la promotion. Elles sont taillées sur mesure pour les bandes-annonces

Quelle est la pochette qui a provoqué chez vous l'effet Eureka ? Ou vous ne vous souciez pas de la musique des bandes-annonces, tant que ça claque ?

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Lorsque j’ai quitté le cocon familial il y a plus de 15 ans, je n’ai pas eu d’autre choix que de me mettre à cuisiner pour moi. Cela dit, il ne m’aura pas fallu longtemps avant que cette nécessité devienne une vertu. Depuis, dégainer la cuillère en bois fait partie intégrante de mon quotidien. Je suis un vrai gastronome et dévore tout, du sandwich sur le pouce au plat digne d’un restaurant étoilé. Seul bémol: je mange beaucoup trop vite. 


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