
Légal, illégal, on s’en fout? – séduit par le piratage des films

Les jeunes aiment se laisser séduire. Surtout par les choses qui sont au bord de la légalité. C’est exactement ce qui m’est arrivé il y a 18 ans. La drogue «copie piratée» m’a déjà rendu accro dès la première consommation.
Nous sommes en 1999 et le monde est en train de changer – ou du moins le nouveau millénaire approche et Hollywood nous le fait sentir. Dans «End of Days», par exemple, Arnold Schwarzenegger combat le diable avec un lance-grenade, «Star Wars» sort la Menace fantôme et «Matrix» rend les personnes manipulatrices schizophrènes. Mais je ne sais pas encore que je vais aussi tomber pour la Matrice – mais la version terrestre.
La tentation
Par une journée ensoleillée en mai 2000, un ami à moi déménage dans une coloc. Je suis gentil et lui donne un coup de main. Pour me remercier, lui et ses amis offrent des spaghettis et de la bière. En buvant, j’entre en conversation avec un coloc un peu plus vieux (il allait vers ses trente ans et, pour moi qui n’en avais que 16, c’était déjà presque un vieil homme). Nous nous moquons du mec défoncé à la gare de Berne qui, grâce aux drogues, est resté dans le trip Matrix et maintenant, parle à tout le monde.
Le schizophrène nous prévient que nous, les humains, ne vivons pas vraiment dans ce monde. Nous ne respirons pas de l’air, mais vivons tous dans un grand rêve commun. Ce dernier perdure seulement, car des machines nous gardent comme esclaves dans le monde réel et nous utilisent comme des batteries. Tous les humains dans les centrales de la machine sont reliés à un univers numérique. C’est dans ce dernier que nous nous trouvons actuellement. Il nous met aussi en garde contre les agents qui pourraient être à notre poursuite, maintenant que nous connaissons le secret…
Ce n’est pas gentil de ma part et de celle des colocs de se moquer. Mais c’est grâce à cette anecdote que nous constatons que nous sommes tous des cinéphiles. Quelques heures plus tard, je quitte la coloc. Avant de partir, l’un des colocs de mon ami me tend trois CD gravés avec un clin d’œil. Sur ces derniers, je peux lire «Codec», «Pour Tinu: Movie 1» et «Pour Tinu: Movie 2». Il me dit que c’est l’avenir et que je devais me laisser surprendre. De plus, je peux aussi jeter mon enregistreur VHS à la poubelle. J’ai juste besoin d’installer un codec.exe et de cliquer sur le fichier AVI sur l’un des CD. Un peu grisé, je ne sais pas encore de quoi il parle et ce que sont exactement ces trois CD.
Mon dépucelage: ma première fois avec une copie piratée
Tout tendu, je démarre le PC à la maison et glisse le premier CD dans le lecteur. En bon élève, je clique sur le codec.exe et confirme que Windows doit bien installer quelque chose. Comme la bière fait son effet, je ne capte pas vraiment ce qui est en train d’être installé.
Enfin, l’illumination: sur le deuxième CD se trouve le film «The Sixth Sense» de 1999. Je vais chercher du popcorn, ouvre encore une bière et me demande comment 110 minutes de film arrivent à rentrer sur un disque de 650 Mo. Surtout que la qualité du film est presque aussi bonne qu’au cinéma. Ou plutôt un DVD. Et définitivement meilleure que la qualité des bonnes vieilles cassettes VHS. Mais ce n’est pas grave – je me détends et savoure le film d’horreur. Totalement captivé, c’est la première fois que je regarde un film sur un PC.
Deux heures plus tard, j’ose à peine aller aux toilettes. J’ai la chair de poule. Ce film, et surtout sa fin géniale, a totalement fait effet. Si j’allais au lit maintenant, je n’arriverais pas à fermer l’œil. Je décide donc d’insérer le troisième CD.
Heureusement, le deuxième film me fait moins peur. Comédie, tragédie et satire se fondent dans le film «American Beauty» du réalisateur Mendes. Au bout de seulement quelques minutes, je suis déjà entièrement captivé par cette œuvre. L’histoire commence par le père Lester, qui se branle sous la douche le matin et qui le décrit comme le temps fort de sa journée.
Je n’arrive pas à croire que je puisse regarder «gratuitement» des films actuels. En tant que futur stagiaire en commerce et pauvre diable, je dois absolument en apprendre plus. Je choisis donc, après avoir vu les deux films, de faire mes recherches toute la nuit.
La Matrice terrestre: l’univers parallèle d’Internet
Je sors mon Nokia 8210 et demande aux colocs, pour 20 centimes, ce qu’il en est de ces deux CD. Je veux savoir pourquoi ils occupent moins de 650 Mo en bonne qualité. La réponse me parvient: un mini SMS de seulement 4 signes qui dit «DivX».
En y repensant, cette nuit est, pour moi, rentrée dans l’histoire. L’Internet m’a déjà fasciné avant ces CD, mais c’est à partir de ce moment là que j’ai passé la moitié de mon temps libre dans l’univers numérique. Cependant, contrairement au film «Matrix» je ne suis pas poursuivi par des agents. Mais m’enfonce de plus en plus profondément dans les méandres de l’Internet – désormais, j’appartiens à la Matrice terrestre. Ayant besoin de réponses, je trouve ce qu’il me faut dans un forum après quelques heures de recherches. Un utilisateur nommé TheBadAssRipper m’aide à y voir plus clair. Nous nous rencontrons dans un IRC (Internet Relay Chat). Il m’explique le principe de base des codecs vidéo, comment ils peuvent réduire le matériel source à une fraction de la taille des données d’origine sans avoir à faire de concession sur la qualité. Je suis comblé, sous le charme et aimerais directement me lancer dans la conversion de mon premier film. Mais je n’ai ni lecteur DVD ni film à portée de main. Donc, pour l’instant, je dois me contenter d’acquérir plus de connaissances.
Je martèle TheBadAssRipper de questions. Il me propose un programme que je pourrais utiliser pour copier les DVD. J’apprends aussi que des groupes s’organisent pour mettre des films sur la toile. Internet échange des films? Incroyable!
Waouh, je suis tout euphorique. Je me calme un peu quand mon nouvel ami m’explique qu’il y a aussi des règles – pas de CC (code civil) mais la loi de l’Internet. Et si, un jour ou l’autre, je souhaitais copier mes films, je devais, dès le début, suivre ces règles. Elles définissent la manière dont un film a le droit d’être partagé sur Internet. Elles sont primordiales pour maintenir l’ordre.
Un e-mail plus tard, je me bats contre la fatigue et les directives de publication de DivX:
The DivX Releasing Standards 2000 (███ rules)[ INTRO ]This group was formed because we thought the new DivX scene was a bit unmoderated, sloppy and pretty much a free-for-all. Leaders of the top 5 DivX releasing groups, topsite siteops as well as rippers and encoders have put their competitive edge against each other to work together for the betterment of the DivX scene. ██████.COM and ████████.COM are proud to bring you the results of Team ████ (███)'s meetings and debates.We realize that not EVERY group was included in these decisions, please do NOT take offense to this decision - We felt we selected enough people from different groups to represent all aspects of the discussion. All opinions were accepted and negotiated and then voted on for final approval. The rules went through 5 beta stages and have now been finally completed. We recognize that we are not perfect and these rules may be changed and/or modified at any time and the group will stay in contact for new developing technologies or conflicts with the current rule system. We would like to request that ALL groups and top sites accept these rules as standards and enforce them strictly. Our goal is to have an organized, acceptable and competitive scene so everyones co-operation is greatly appreciated.If ANYONE has any suggestions/comments/complaints please feel free to email us: ███@████████.com (futher contact info at the bottom). We want to work with all of you, not against you. Thanks in advance for the positive input and support.// ██████ - Coordinator[ RELEASE RULES ]Movie MUST fit the following rules (applies to XXX as well):EITHER:- Released to DVD in the past 31 days (NO CLASSICS, NO EXCEPTIONS unless it is a siteop request and then it should not travel further than specified site)
- Original Screener Tape -> DivX: Referred to as 'PRVHS' (see Notes section), MUST be ORIGINAL screener tape -> divx (NOT the vcd screener - see reasons posted under 'vcd -> divx NOT allowed' in Notes section), MUST be 512xXXX or BETTER, MUST be named Movie.Title.PRVHS.Divx-GROUP
- VCD (includes vcd screeners, telesyncs, cams, workprints) -> DivX will NOT be allowed (see Notes section)
- VHS -> DivX will NOT be allowed (NO EXCEPTIONS)
- MULTI-LANGUAGE - (see Notes section)
- ONLY allowed if they make it to DVD and fit the date rules (released within 31 days)
- Movies under 105minutes must be under 700 MBs.
- Movies over 105minutes CAN be 2 CDs. Each under 650MBs.
- Must use the Low-Motion Codec.
- Video shall be a minimum of 720Kbs.
- Audio shall be a minimum of: WMA 96kbs, 44kKz / MP3 128Kbs, 44kKz
- Audio should NOT be 48Khz, quality degrades on standard sound cards.
- All release must be .AVI, not BIN/CUE. (see Notes Section)
- Must be packed with RAR. NO compression is needed (proven worthless) and broken into 15MB or 20MB volumes
- Must have SFV.
- Must have NFO.
- NFO MUST INCLUDE: group name, title, actual divx release date, US theater release date, DVD release date, audio bitrate (and stating wma or mp3), video bitrate, movie runtime/length, IMDB/adultdvdempire link, number of rars per cd (eg. 44x15MB), widescreen indication in the nfo only - NOT in the directory name
- NOT required in the .avi itself
- NOT required in the .nfo - it is 'recommended' to list the main few characters as IMDB lists them
- REQUIRED
- 1 (one) full minute in length (approx 10MB) and in separate folde marked 'SAMPLE'
- MUST be taken from the movie - NOT encoded separately
- Directory names shall NOT exceed 64 characters
- DO NOT indicate WS (widescreen), DATE, GENRE or anything else in the directory name. (ONLY within the nfo)
- Acceptable characters in naming a directory include: (NO spaces or double dots - single dots or underscores ONLY), ABCDEFGHIJKLMNOPQRSTUVWXYZ, abcdefghijklmnopqrstuvwxyz, 0123456789 . -_
- Movie.Title.DVDrip.Divx-GROUP
- Movie.Title.PRVHS.Divx-GROUP
- Movie.Title.XXX.Divx-GROUP (assuming ALL xxx releases are dvdrips, we do not need to say so in the directory name)
- Releases that are more than 1 (one) CD will follow these specs: MUST be named CD1, CD2, CD3 and so on. ('disc1', etc will NOT be allowed), There MUST be an sfv included for each CD, rars MUST be broken into 2 or more CD volumes. (78 rars of a 2 disc title will NOT be tolerated)
- Movies should be ripped in their most widescreen format available.
- Watermarks WILL NOT BE ALLOWED IN ANY CASE
- vcd -> divx is NOT ALLOWED: lose ability to be played in dvd player, waaaay too many releases, no quality upgrade, just smaller packaging, flood of crap groups (no skill involved, just a race to leech, convert and re-release)
- PRVHS = Pre Release VHS which is also equivalent to Original Screener, tape but this naming system will avoid confusion for nukers when it comes to nuking vcd -> divx because 'screener' is typically associated with vcd
- NO TV Movies or Straight To Video: UNLESS it makes it to dvd - then the 31day rule is applied, quality, commercials, too many tv movies, only the good ones make it to dvd
- AVI and not BIN/CUE: Some ppl burn to archive and play on a computer at a later time, BUT since there is no outside purpose other than playing on the computer, there is NO need to be packaged as bin/cue
- NO Multi-Language (keep in mind the goal of preserving the highest quality in the smallest package): Not enough demand, DEGRADES the quality, Adds unnecessary space
- ███ - █████ - ██████ - ███ - ███ - ██████ - ███████ - ████ - █████ - █████████ - ███████ - ████ - ████████ - █████ - ████████ - ███████ - ███ - █████████ - █████████ -
WWW: www.████████.com
IRC: #████████ / #███████ (efnet)
Avant de sombrer dans le sommeil, je décide de m’acheter un lecteur DVD avec mon premier salaire d’apprenti et d’entrer dans ce nouvel univers magique.
TO BE CONTINUED...


Le baiser quotidien de la muse stimule ma créativité. Si elle m’oublie, j’essaie de retrouver ma créativité en rêvant pour faire en sorte que mes rêves dévorent ma vie afin que la vie ne dévore mes rêves.