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Le monde des cyborgs : société d'égaux ou d'inégaux ?

Kevin Hofer
20/3/2018
Traduction: traduction automatique

Nous sommes tous (au moins temporairement) des cyborgs. C'est ce que je concluais dans l'article "Quand l'homme deviendra-t-il un cyborg ?" Les possibilités d'optimiser le corps semblent illimitées. La cyborgisation va modifier durablement notre société. J'examine dans quelle direction cela pourrait aller dans l'article suivant.

Lorsqu'Oscar Pistorius s'est élancé sur le tartan, on aurait dit que quelqu'un courait sacrément vite sur des talons aiguilles. Le "Blade Runner", comme on l'a surnommé, a réalisé des temps impressionnants en tant qu'amputé des deux jambes. Pour illustrer mon propos, je qualifierai Pistorius de cyborg. En raison de la technologie sophistiquée des prothèses de jambe en plastique renforcé de fibres de carbone, cela me convient (vous trouverez ma définition de cyborg plus bas). L'exemple de Pistorius illustre en effet les défis sociétaux que la cyborgisation peut nous poser. Par cyborgisation, nous entendons ici l'évolution vers une société homme-machine. Le Sud-Africain Pistorius a récemment fait parler de lui pour le meurtre de sa petite amie. On en oublierait presque qu'il a été le premier athlète amputé des deux jambes à participer aux Jeux olympiques d'été de 2012. Le fait que Pistorius ait pu participer aux Jeux olympiques en tant que personne handicapée suggère que la cyborgisation peut combler les différences entre les humains et les cyborgs. Les choses ne sont toutefois pas aussi simples. La question a été soulevée de savoir dans quelle mesure les prothèses de Pistorius lui confèrent un avantage par rapport aux personnes non handicapées. Les personnes non handicapées ne pourraient-elles pas courir plus vite que lui avec des prothèses adaptées ? Si oui, elles constitueraient une forme de dopage et devraient probablement être exclues de la compétition.

Qu'est-ce qu'un cyborg?
Cyborg est l'abréviation de "Cybernetic Organism", un être hybride homme/machine. Mais un cyborg ne se caractérise pas seulement par le mélange de l'humain et de la machine, mais aussi par le mélange de l'organique et du numérique. C'est pourquoi, comme je l'ai argumenté dans l'article précédent, les smartphones peuvent déjà faire de nous des cyborgs, au moins temporairement.

Oscar Pistorius aux Jeux olympiques de Londres
Oscar Pistorius aux Jeux olympiques de Londres

Qui peut se le permettre?

Cet exemple montre que la cyborgisation permet de réduire les différences entre les humains et les cyborgs. En optimisant son corps, Pistorius a compensé un désavantage. Mais l'optimisation peut aller si loin que le désavantage se transforme en avantage. C'est là tout l'enjeu des craintes liées à la cyborgisation : celui qui optimise le plus son corps a un avantage sur les autres et cela a d'énormes conséquences sociales.

L'exemple du sport peut être appliqué à tous les domaines de la vie sociale. Prenons l'exemple des smartphones qui, comme je l'ai argumenté dans le texte précédent, font de nous des cyborgs, au moins temporairement. Ceux-ci sont interdits lors des examens, car leur utilisation nous donnerait un avantage sur les autres. Ils font partie de notre vie sociale et, contrairement aux prothèses de Pistorius, ils sont à la disposition de tous ceux qui ont de l'argent. Ce qui nous amène au point suivant : l'argent. L'argent, on le sait, ne peut pas tout acheter, mais il peut quand même acheter beaucoup de choses. Avoir un smartphone plus cher permet notamment d'accéder plus rapidement aux informations, de stocker plus d'informations et de prendre de plus belles photos. Nous avons plus d'avantages avec un meilleur smartphone qu'avec un moins bon. La cyborgisation ne nous sépare donc pas seulement entre ceux qui peuvent s'offrir un avantage et ceux qui ne le peuvent pas. Elle nous sépare également en ceux qui peuvent s'offrir de meilleurs ou de moins bons avantages. Les technologies futures pourraient avoir un impact encore plus important.

Pour une meilleure illustration, la série de science-fiction "Altered Carbon" est un bon exemple. Dans celle-ci, la conscience des gens peut être numérisée dans des "piles" et insérée dans de nouveaux corps, des "manchons" dans la série. Les personnes riches peuvent ainsi s'offrir une quasi-immortalité dans leur propre corps, en clonant leur propre corps et en transférant leur conscience dans un clone si nécessaire. De plus, ils font toujours des sauvegardes de leur conscience afin de pouvoir la transférer sur une nouvelle pile en cas de besoin. Les personnes moins riches ou plus pauvres n'ont pas cette option. S'ils le souhaitent, ils sont transférés dans d'autres corps. "Altered Carbon" dresse un tableau sombre de l'avenir, dans lequel l'écart entre les riches et les pauvres est extrêmement important. Grâce à la technologie, une élite s'est distinguée du reste et a atteint un statut équivalent à celui d'un dieu. Cet exemple montre que la cyborgisation peut extrémiser les rapports de propriété. La cyborgisation risque-t-elle d'accroître les inégalités sociales ?

Les évolutions sociales

Historiquement, les inégalités sociales ont été et sont toujours soumises à des changements constants. Aujourd'hui, les rapports de propriété sont quasiment équilibrés par rapport au Moyen-Âge. Selon une étude de 2016, les 10 % supérieurs en Europe disposent en moyenne de 37 % du revenu national (source : RP Online). Au Moyen Âge, la proportion de paysans en Europe, la couche la plus pauvre de la population à l'époque, était d'environ 90 pour cent (source : La vie au Moyen Âge.net). Cependant, le développement des nouvelles technologies a profondément modifié notre société. Grâce à l'industrialisation, de nouvelles possibilités de travail se sont développées pour les personnes moins ou pas du tout éduquées. Le travail à la chaîne fordiste en est un exemple. Ces personnes ont pu se tailler une part, même minime, de la prospérité. Dans notre société de l'information et des services, la situation se retourne. Un haut niveau d'expertise est requis. Les nouvelles technologies rendent de plus en plus de force humaine superflue. Les personnes moins ou mal formées sont les victimes de cette évolution et leurs conditions de vie se précarisent. On peut citer ici l'exemple du travailleur à la chaîne classique, qui est de plus en plus remplacé par des machines. Mais les personnes qui dépendent de contrats de travail flexibles peuvent également vivre dans des conditions précaires.

Dans cette optique, l'élément déclencheur des changements dans les inégalités sociales est le développement des nouvelles technologies. Les craintes selon lesquelles la cyborgisation renforce les inégalités sociales ne sont donc pas totalement infondées d'un point de vue historique. Je voudrais toutefois opposer un argument à cette affirmation
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Déclin industriel : de plus en plus de personnes peu éduquées vivent dans des conditions précaires.
Déclin industriel : de plus en plus de personnes peu éduquées vivent dans des conditions précaires.

La confiance

La société cyborg est une société hautement technologique. Cela implique avant tout une grande confiance de l'homme dans la technologie. Si l'on prend l'exemple du smartphone, cela peut paraître un peu ridicule, mais si l'on prend l'exemple d'un pacemaker, c'est une autre histoire. Si nous avons besoin d'un stimulateur cardiaque, nous devons avoir une grande confiance dans son fonctionnement et son efficacité. Sans cette confiance, personne ne se ferait implanter un stimulateur cardiaque. Il en va de même pour le smartphone, qui n'est pas forcément une question de vie ou de mort : Si nous dépendons de notre téléphone portable lorsque nous sommes en déplacement, nous devons avoir confiance dans le fait qu'il ne nous laissera pas tomber. Par exemple, lorsque nous attendons un appel qui pourrait changer notre vie ou lorsque nous sommes perdus au milieu de nulle part. Dans ces moments-là, nous avons une confiance énorme dans le savoir qui se cache derrière les appareils. La plupart d'entre nous ne comprennent pas, ou pas complètement, le fonctionnement de ces technologies. Nous nous retrouvons dans une situation de dépendance. Nous sommes dépendants des connaissances contenues dans ces technologies. Si nous voulons les utiliser, nous sommes pour ainsi dire obligés d'y placer notre confiance. Cette confiance que nous plaçons dans le savoir, et donc dans nos semblables, nous engage très fortement dans des processus sociaux.

Pour un pacemaker, il faut de multiples connaissances expertes.
Pour un pacemaker, il faut de multiples connaissances expertes.

Les connaissances impliquées dans les technologies cyborgs sont des connaissances expertes. Dans la plupart des cas, la production d'une telle technologie nécessite les connaissances de plusieurs experts. L'exemple du pacemaker en est la preuve. Pour pouvoir développer un stimulateur cardiaque, il faut connaître l'interaction entre le muscle cardiaque et le système de conduction. Ensuite, le stimulateur doit être alimenté d'une manière ou d'une autre. Cela fonctionne avec une pile au lithium. Le développement de celle-ci nécessite également des connaissances. Ensuite, il faut aussi développer le dispositif en lui-même. Comme je ne suis pas un spécialiste, j'ai certainement oublié quelque chose. Mais ce que je viens de dire montre que plusieurs systèmes de connaissances sont réunis pour produire la technologie cyborg. Nous ne plaçons donc pas notre confiance dans une seule connaissance, mais dans des systèmes de connaissances entiers, et nous avons confiance dans le fait que leur interaction fonctionnera. Après tout, tous les porteurs de stimulateurs cardiaques ne disposent pas à tout moment d'une armée d'experts capables de réagir immédiatement en cas d'urgence. Lorsque nous utilisons de telles technologies, nous avons confiance dans le fait qu'elles ont été correctement développées et testées.

Les cyborgs vivent en permanence dans le danger

L'utilisation d'une technologie complexe est donc toujours associée à un certain danger. Le stimulateur cardiaque peut s'arrêter. L'utilisation de technologies cyborgs est dangereuse, nous devons compter sur les autres pour que ces technologies soient sûres. Cette dépendance vis-à-vis des systèmes de connaissances fait des cyborgs des êtres hautement sociaux. Ils ne dépendent pas seulement des connaissances d'experts, mais aussi d'autres cyborgs. La frontière entre l'individu et la société devient de plus en plus floue. Les cyborgs sont conscients de leur dépendance vis-à-vis des systèmes de connaissances et des autres cyborgs. En effet, il y a toujours quelque chose de social dans la technologie. En tant que cyborgs, nous prenons des risques et cédons une partie de notre individualité.

Le social comme opportunité

C'est dans cette dépendance, ou plutôt dans l'importance croissante du social à travers la cyborgisation, que je vois la chance que l'avenir ne soit pas forcément aussi sombre que dans "Altered Carbon". En optimisant nos corps, nous devenons également plus vulnérables. Plus nous sommes optimisés, plus nous sommes vulnérables. L'optimisation ne nous procure donc pas seulement des avantages, mais aussi des inconvénients, en ce sens que nous cédons une partie de notre individualité et que nous nous plaçons dans une relation de dépendance. De cette dépendance, nous devenons des êtres encore plus sociaux. Les cyborgs ne peuvent pas se permettre de vivre dans des châteaux en Espagne, au sens propre comme au sens figuré, comme l'élite d'"Altered Carbon". Ils doivent être des êtres sociaux s'ils veulent survivre. Comme c'est le cas depuis la nuit des temps. Je ne veux pas dire que nous n'aurons plus de différences dans une société cyborg. Les inégalités sociales existeront toujours. Mais je ne vois pas de situation comme celle d'"Altered Carbon" dans une société cyborg.

Qu'en pensez-vous ? La société cyborg sera-t-elle une utopie ou une dystopie ? Ou bien vous êtes comme moi et vous penchez pour le "ni l'un ni l'autre" ?

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La technologie et la société me fascinent. Combiner les deux et les regarder sous différents angles est ma passion.

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