Image : Lawrence Livermore National Laboratory (LLNL)
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La fusion nucléaire au laser fait un grand pas en avant

Jusqu’à présent, l’expérience de fusion nucléaire au laser ne retournait que 3 % de l’énergie introduite. Aujourd’hui, ce chiffre est subitement passé à 70 %. Une étape importante, selon les experts.

Le National Ignition Faciliyt (NIF) des États-Unis vient d’annoncer un succès important dans ses tentatives de production d’énergie par fusion nucléaire : l’expérience a pour la première fois permis de libérer environ 70 % de l’énergie dépensée au préalable pour déclencher le processus de fusion. Durant plusieurs années, les experts n’étaient parvenus qu’à récupérer au maximum 3 % de l’énergie utilisée. L’expérience qui vient d’avoir lieu constitue donc une « avancée importante dans la recherche sur la fusion nucléaire », déclare l’expert en fusion laser Markus Roth de l’Université technique de Darmstadt et qui a travaillé à la construction du laser.

L’objectif de la recherche est bien sûr d’obtenir plus d’énergie à la fin du processus que celle utilisée au début. Depuis longtemps, les chercheurs du FNI recherchent le seuil de rentabilité, c’est-à-dire le point où l'apport et la production d’énergie se trouvent dans un équilibre parfait. Ils s’en sont approchés comme jamais auparavant lors de l’essai du 8 août 2021 : les 1,9 mégajoule pour le laser ont été presque égalés par 1,3 mégajoule d’énergie libérée.

Dans les locaux du NIF, exploité par le Lawrence Livermore National Laboratory (LLNL) à Livermore (Californie), la chaleur et la pression nécessaire à la fusion nucléaire se génèrent par un flash laser ultra-court et de haute énergie. Le combustible, un mélange d’isotopes d’hydrogène, le deutérium et le tritium, est enfermé au centre du dispositif dans une capsule d’environ deux millimètres, elle-même placée dans un cylindre en or d’un centimètre. Un total de 192 faisceaux laser individuels concentrent leur lumière pendant 20 milliardièmes de seconde sur l’or, qui se vaporise et projette des rayons X au centre de la capsule, qui à leur tour compriment et chauffent la capsule à tel point que les noyaux atomiques de l’hydrogène qu’elle contient entrent en fusion.

Le procédé s’est avéré plus compliqué que prévu lorsque le projet a vu le jour en 2009. La revue scientifique Science nous apprend que les derniers progrès doivent beaucoup à une meilleure compréhension des processus impliqués dans l’implosion, ce qui a conduit à un certain nombre de petites améliorations : les parois de la sphère ont par exemple été débarrassées d’irrégularités microscopiques.

Le processus dépend de l’« allumage » du combustible : l’énergie libérée par les premières réactions de fusion doit rester au centre de l’ancienne capsule suffisamment longtemps pour la chauffer si fortement que d’autres fusions se produisent, qui à leur tour font avancer le processus avec leur énergie. Seule cette réaction en chaîne permet de transformer une grande partie du combustible.

Le fait que l’énergie libérée ait été tout à coup beaucoup plus importante que lors de toutes les tentatives précédentes suggère qu’une telle réaction en chaîne a été réalisée pour la première fois, du moins dans une certaine mesure. Voilà la raison pour laquelle ces résultats paraissent si importants aux yeux des chercheurs en fusion nucléaire.

Cependant, la fusion laser ne serait pas encore prête à être utilisée même si elle devait atteindre ou même dépasser le seuil de rentabilité. L’énergie libérée s’accumule d’abord sous forme de neutrons rapides. Selon « Science », il faudrait tirer sur dix de ces capsules par seconde pour les convertir en une forme utilisable, un défi techniquement énorme. Le succès commercial de la fusion laser s’avère donc tout aussi incertain que celui des procédés alternatifs tels que ceux testés au centre européen de recherche sur la fusion nucléaire ITER en France.

Vu que la fusion nucléaire transforme surtout l’hydrogène en hélium, le processus est considéré comme plus ou moins respectueux de l’environnement, du moins en théorie. En outre, les quantités de déchets radioactifs produites sont nettement inférieures et il n’existe pas de risque de fusion incontrôlée et destructrice du cœur du réacteur, comme c’est le cas dans une centrale nucléaire classique.

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Photo d’en-tête : Image : Lawrence Livermore National Laboratory (LLNL)

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